mardi 27 novembre 2012

Les spéculateurs ? Tous des enc… ! Oui… mais non, enfin pas toujours.



Les méchants spéculateurs qui ne pensent qu’à leurs profits sont nuisibles à la société !

1-    L’utilité des marchés financiers.


Pour avoir des spéculateurs financiers il faut des marchés financiers. Et les marchés financiers ont certes des travers, mais apportent aussi de nombreux avantages. Parmi eux, la capacité à collecter d’importantes ressources financières pour financer des investissements qui n’auraient pas pu l’être de manière « traditionnelle » avec une banque ou un groupe restreint d’investisseurs. On peut penser par exemple au développement du chemin de fer ou des compagnies maritimes dès le XIXème, et surement avant, mais aussi aux investissements liés à l’énergie ou à la recherche pharmaceutique par exemple.
Dans sa forme théorique, les marchés financiers sont efficients. Ils permettent la rencontre entre l’offre et la demande, entre ceux qui ont des besoins de financement et ceux qui sont en capacités de financer, cela au meilleur prix. De plus, les acteurs du marché, à la recherche de profits, sont à priori plus aptes à déterminer les projets les plus rentables qu’une autre forme de discrimination par exemple par les pouvoirs publics (problème d’intérêt, de capacité et de compétences spécialisées pour juger). Donc mis à part certains cas où l’Etat a intérêt à se substituer aux marchés pour fournir des biens qui ne seraient pas financer de manière acceptable suivant les valeurs d’une société, par exemple l’éducation en France, les marchés sont utiles et performant (mais aussi imparfaits dans la pratique).

2-    La distinction entre les investisseurs et les spéculateurs



On peut distinguer au moins deux types d’intervenant sur les marchés financiers : les investisseurs et les spéculateurs.

Les investisseurs prennent des positions sur le long terme qui servent de socles stables dans le financement d’une activité. Ils participent parfois aux conseils d’administration  et influencent la stratégie s’il s’agit d’une entreprise. Ils peuvent être également des ménages ou des institutions qui financent la dette des Etats dans le souci de sécuriser leurs investissements, de rendement, de liquidité, de contrainte légale, voir par patriotisme. La dette financée par les marchés sert à payer par exemple : le système de santé, l’éducation, la sécurité, la justice, les infrastructures et les investissements  étatiques, les intérêts des emprunts précédents etc…

Les spéculateurs, eux prennent des positions de court terme à la recherche de profits important et rapides. Souvent accusé d’être la cause de tous les maux, sont-ils néanmoins nécessaires ?

3-    L’intérêt de la spéculation


Le principal bienfait de la  spéculation est d’augmenter la liquidité du marché (capacité à pouvoir vendre/acheter un actif en trouvant facilement un partenaire capable d’acheter/vendre cet actif) ce qui favorise le développement de l’investissement à long terme. En effet, savoir que l’on peut récupérer son investissement à tout moment en cas de nécessité favorise l’investissement de longue durée. A l’inverse, un manque de liquidité entraine une hausse des prix pour compenser la prise de risque, et dans un même temps tire les prix à la baisse par la fuite des investisseurs qui ne souhaitent pas supporter ce risque, donc ce manque rend les prix plus volatils toutes choses égales par ailleurs.
L’augmentation du nombre d’intervenants et du nombre de transactions – conséquences de la spéculation - favorise la formation du juste prix (théorie des marchés efficients).  Le prix étant la moyenne des anticipations de chaque intervenant à l’instant t, plus ils sont nombreux plus le prix de marché reflète l’ensemble des informations disponibles à cet instant sachant que chaque intervenant est incapable individuellement d’estimer ce juste prix à tout instant. Toutefois, la formation de bulles et l’observation de comportement moutonnier remet en cause cette efficience.
Le trading à haute fréquence qui consiste à effectuer un grand nombre d’opérations de manière automatique sur une courte période est actuellement diabolisé. Mais son utilisation n’est pas si néfaste au moins en ce qui concerne les opérations dites de « tenue de marché » qui consistent justement à apporter la liquidité nécessaire pour rendre un marché attractif aux yeux des investisseurs et participer également à la formation du prix efficient.

4-    Mais les histoires de spéculateurs avides de profit capables de mettre en faillite des entreprises ou de ruiner des Etats participent à la crainte/haine de la spéculation.


Georges Soros a par exemple spéculé publiquement contre la livre sterling au début des années 90 pour la faire sortir du SME (système monétaire européen) et contraindre la Banque d’Angleterre à dévaluer sa monnaie. Or, Soros a réussi son coup uniquement parce que les fondamentaux économiques anglais le permettaient, la monnaie était surévaluée. Dans « Pourquoi les crises reviennent toujours ? », Krugman rapporte que l’Angleterre serait de toute façon sortie du SME et aurait dévalué sa monnaie. Soros n’a fait qu’accélérer les événements de quelques semaines.

La réussite d’une spéculation n’est possible que si les fondamentaux le permettent, elle ne fait alors qu’anticiper les événements avec des conséquences plus ou moins brutales mais qui au final seront les mêmes que celles sans l’attaque spéculative. S’il y a une spéculation réussie avec des fondamentaux  non favorables, c’est justement que le poids des spéculateurs qui se sont entendus pour mener l’offensive était anormalement élevé comparé à la taille du marché, ce qui est le cas quand il manque de liquidité et de profondeur, autrement dit quand il manque de spéculateurs pour parier dans le sens des fondamentaux !

Bref, la spéculation en tant que telle n’est pas la source des problèmes. Au contraire, elle répond à des nécessités au fonctionnement des marchés.

On pourrait discuter des réformes à mettre en place pour réguler les comportements nocifs, de l’influence des politiques monétaires accommodantes sur les prix des matières premières, ou des liens entre les politiciens-législateurs et les financiers, les dérives de la finance et sa responsabilité dans la crise etc… Mais ce n’est pas le sujet ! Pour ça il y a ça ou ça et dix milles autres trucs.

4 commentaires:

  1. Article intéressant! Toutefois la haine des investisseurs que tu décris ne proviendrait-elle pas plus des produits financiers toujours plus complexes qu'ils manipulent (pour certains relevant plus du casino qu'autre chose)que de leur simple activité de pari?

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  2. Les produits complexes ou "dérivés" ont tjrs une utilité à la base? Les CDS par exemple c'est des assurances contre le défaut de paiement ça peut être utile mais c'est des outils spéculatifs surtout pcq qu'on peut les acheter sans avoir acheter de la dette qui est derrière, ce qui revient à acheter une assurance sur la maison de ton voisin et espérer très fort qu'elle brûle... Les contrats à terme aussi sont spéculatifs mais à la base ils servent à garantir un prix pour ce protéger des variations.. etc.. Les produits dont tu dois parler sont les produits qui contenaient les subprimes. En gros on a regroupé toutes sortes de prêts de différentes qualités dans l'idée de diluer le risque et en théorie le rendre quasi nul. La réalité c'est qu'on a été incapable d'estimer le véritable niveau de risque de ces produits. Ces produits avaient la meilleur note pour les agences de notations (= risque nul. Ils se sont trompés...

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  4. Merci pour ta réponse! Pour tout te dire c'était une question un peu naïve!

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